Résister à la publicité : la fédération se positionne et vous invite à son « test de paternité »

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Tout le monde le sait: nos modes de production et de consommation actuels ne sont pas durables. La publicité, en nous incitant à consommer toujours plus, a donc une part de responsabilité non négligeable et peut peser plus ou moins lourd dans la balance. Mais quels sont les facteurs de risque, et quelles solutions peuvent y être apportées? Je vous propose de faire un petit tour de la question…

Une des plus grandes forces de la publicité est son omniprésence dans les lieux que nous visitons, qu’ils soient réels ou virtuels (supermarchés, télévision, internet, radios, transports en commun, GSM, etc.). Si cette présence peut être considérée comme abusive, c’est principalement l’influence déterminante de la publicité sur notre consommation, et surtout sur notre propension à surconsommer qui est la plus problématique. En promettant nombre de satisfactions lors de l’achat des produits qu’elle promeut, la publicité influe sur les comportements du consommateur, induit de nouveaux besoins d’achats, parfois superflus, tout en faisant naître, consciemment ou non, une certaine frustration de ne pas correspondre au stéréotype qu’elle crée.

En incitant à la surconsommation, la publicité promeut un mode de vie non durable et non soutenable. Plus de trois planètes seraient nécessaires si tous les habitants de le Terre consommaient comme les Belges… Certes, cela peut sembler moins grave que les cinq planètes nécessaires si tous les Terriens imitaient les Américains. Mais cela est catastrophique quand on considère la réalité: c’est une et une seule planète Terre qui existe, et nous l’avons déjà sérieusement mise en péril.
Il est plus que temps d’agir, et ramener notre consommation à des niveaux plus responsables, équitables. Mais tant que la publicité, avec toute sa force de frappe, incite à faire l’inverse, ces appels à une consommation durable resteront vains.

Les publics sensibles et le greenwashing

Les enfants sont particulièrement sensibles à l’impact des messages publicitaires, et en particulier les enfants issus de milieux modestes. Leur sens critique n’étant pas encore suffisamment développé, ils n’ont pas le recul nécessaire pour considérer la pub comme ce qu’elle est: un moyen de vendre un produit, un service ou une idée, qu’on le veuille ou non.

Depuis plusieurs années, des services et produits de plus en plus nombreux sont présentés dans les publicités comme « protégeant la nature », « écologique » ou « protégeant l’environnement », alors que l’intérêt du produit ou du service pour l’environnement est minime, voire inexistant, et consiste plus souvent en impacts négatifs (voitures, produits chimiques, etc.).

De telles pratiques sont désignées sous le terme anglais « greenwashing ». Les conséquences pour le consommateur sont assez nombreuses; la première étant la confusion qui peut en découler, tout comme l’instauration du doute sur ce qui est vraiment écologique et ce qui ne l’est pas. Confrontés à un trop plein d’informations sur la question de la préservation de l’environnement, informations souvent déversées sans mode d’emploi, hors contexte et de manière incomplète, voire contradictoire, il nous est de plus en plus difficile de juger de manière impartiale les qualités de tel ou tel produit. Le « greenwashing », qui est par essence une information non seulement déviée, mais parfois mensongère, ne fait qu’ajouter à la confusion.

Le contrôle

De nombreuses pratiques publicitaires sont régies par des codes d’autorégulation. Parmi eux, le code de publicité pour les denrées alimentaires (code FEVIA), le code en matière de publicité pour les véhicules automobiles ainsi que leurs composants et accessoires (code FEBIAC), et le code de la publicité écologique, qui avait pour but d’empêcher le greenwashing. Le Jury d’éthique publicitaire (JEP) est chargé du contrôle du respect de ces codes et des prescrits réglementaires.

Néanmoins, l’efficacité de ce système est sérieusement mise en doute: le JEP, étant juge et partie, manque de neutralité lors de l’évaluation des plaintes. Par ailleurs, pour qu’une publicité soit évaluée par le JEP, il faut qu’une plainte ait été déposée…Mais la culture de la plainte étant inexistante ou presque en Belgique, ces dernières sont rares.
Heureusement, des campagnes d’action spécifiques comme « Affichez le CO2 » permettent de lancer le mouvement. Enfin, les avis du JEP n’ont aucun caractère contraignant, et sont souvent émis après la fin de la campagne… trop tard pour être d’une quelconque utilité donc.

Les solutions

Des possibilités d’améliorer la situation existent. Parmi elles, la révision du code de la publicité écologique. Il s’agit non seulement de le compléter, mais également de le transposer en Arrêté royal et lui conférer force de loi. L’avant-projet de plan produit, soumis à la consultation publique, propose notamment de baser cette révision sur la norme ISO, mais aussi d’opérer la transposition en Arrêté royal. N’hésitez pas à participer à cette consultation!

La création d’un observatoire de la publicité, chargé d’évaluer l’utilisation d’allégations environnementales avant diffusion d’une publicité nous semble également fondamental. Cette évaluation pré-diffusion, déjà d’application pour les publicités pour médicaments, permettrait de s’assurer du respect de quelques règles qui nous semblent primordiales, et notamment l’interdiction d’utilisation d’allégations environnementales pour les produits ayant un impact avéré sur l’environnement, et dont la consommation doit impérativement diminuer dans les années à venir pour assurer un avenir viable aux générations futures: le domaine automobile (carburants, pneumatiques), les services dont la mise en ½uvre requiert nécessairement l’utilisation d’un appareil comprenant un moteur thermique (voyages en avions, croisières, etc.), les équipements électriques, les appareils de chauffage et climatiseurs, la viande. Ce type de mesure a déjà été adopté par d’autres pays européens, comme la Norvège par exemple qui a interdit l’utilisation d’allégations environnementales dans les publicités pour les automobiles.

Perspectives

De nombreuses associations agissent pour attirer l’attention des consommateurs sur les effets de la publicité et la nécessité de la considérer d’un ½il critique. Parmi ces initiatives, la plate-forme Vigilance Action Pub! , fruit de la collaboration entre une dizaine d’associations, a une place de choix: inter-régionale, elle se concentre tant sur les aspects environnementaux que sociaux, culturels, etc. liés à la publicité.

Ce 11 décembre 2009.

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La participation est gratuite, ouverte à tous… sous réserve d’inscription. Par mail : v.xhonneux@iewonline.be ou par téléphone : 081.255.280

Conclusion

Si à long terme, c’est une modification de notre société, notamment de nos modes de production et de consommation qui doit être visée, il serait simpliste de considérer la publicité uniquement comme un symptôme révélateur des valeurs et de l’organisation de notre société. Le but n’est pas tant de faire disparaître toute forme de publicité, mais surtout de préserver certains lieux et publics plus fragiles de l’intrusion publicitaire. Le but est également de réglementer plus fortement – voire interdire – la publicité pour les produits allant à l’encontre des principes et des politiques de développement durable. C’est déjà le cas dans d’autres domaines comme les médicaments ou le tabac.

Les possibilités d’agir existent, aux autorités d’en saisir les opportunités pour contribuer à réorienter nos modes de production et de consommation vers un développement plus… soutenable.

Prenez connaissance de la position complète.

Valérie Xhonneux

Anciennement: Santé & Produits chimiques